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Portrait Justine, femme nature voile

Justine, Femme-Nature

Voici le nouveau portrait de Femme-Nature. Une série qui porte sur le parcours de femmes inspirantes pour qui la nature occupe une place privilégiée au quotidien.

En juin dernier, sur le fleuve Saint Laurent, se célébrait un bel anniversaire : les dix ans de la désormais mythique Coupe Fémina. Lancée en 2014 par Michelle Cantin, propriétaire de l’école de voile Formation Nautique Québec, cette course offre un espace de pratique entre femmes, de compétition amicale, de dépassement et surtout une expérience humaine unique. Rapidement, j’y fais la connaissance de Justine Lamonde, jeune skipper et déjà instructrice de voile. Bien sûr, il fallait que je vous la présente!

Du haut de ses 23 ans, Justine est incroyable ; une de ces forces tranquilles qui traquent et relèvent les défis sans faire de vague. Originaire de Québec, elle a grandi à Lévis puis étudié à l’Université Laval de Québec et termine actuellement un bac en soins infirmiers en Belgique. Ce qui distingue Justine, ce n’est pas seulement sa passion pour la voile et l’aventure, mais sa grande détermination, son engagement dans ses projets et bien sûr sa connexion à la nature, un élément fondamental dans sa pratique sportive.

 

Justine, Femme-Nature, voile, Coupe Fémina
©Coupe Fémina
Portrait Justine, Femme-Nature

Comment as-tu découvert la voile?

J’ai commencé la voile en 2018 grâce à un programme jeunesse organisé par Coupe Fémina et Formation Nautique Québec. Ma rencontre avec Michelle Cantin, qui en est la fondatrice et qui le présentait dans mon école secondaire a été déterminante. J’ai tout de suite été attirée et j’ai saisi l’opportunité d’une formation de base gratuite pour prendre part ensuite à la compétition. Dès mon premier cours, ça a été une révélation. J’ai immédiatement accroché. Après avoir participé à la Fémina Jeunesse, j’ai continué à me former, notamment en tant qu’équipière, puis chef de bord et j’ai même refait les formations pour accumuler du temps de mer. J’ai aussi participé à de nombreuses régates de la marina du Parc Nautique Lévy ; et pour acquérir de l’expérience, j’ai également fait des convoyages de Rimouski à Québec en 2021 ou depuis la Floride. Aujourd’hui, je suis en voie d’être certifiée instructrice.

Pourquoi la voile te passionne-t-elle autant?

J’aime beaucoup le côté sportif, les régates ; ça me rappelle un peu l’adrénaline et l’esprit de compétition que je ressentais au hockey pendant mon sport-études. Ce qui me plaît le plus, c’est l’aspect stratégique des courses. En voile, il faut constamment réfléchir et jongler avec les éléments naturels. C’est un sport très physique, mais qui sollicite autant le cerveau que le corps et c’est ce qui me m’attire. Quand on fait une régate, il faut penser à nos bouées, à notre objectif et choisir le courant qui va être le plus fort et le plus avantageux, ou bien comment profiter au mieux du vent pour atteindre l’objectif. La prise de décision est très rapide. Je trouve que c’est une belle combinaison de compétences mentales et physiques.

Quel rôle joue la nature dans ton approche de la voile ?

La nature est le fondement même de la stratégie en voile. Quand je navigue, chaque décision que je prends est influencée par les conditions autour de moi. Par exemple, je dois toujours prendre en compte la direction du vent, la force des courants, la hauteur des vagues, la topographie sous-marine et les conditions météo. Parfois, le vent faiblit et on doit chercher des courants plus forts et adapter les voiles pour capter un maximum de vent. La voile demande une observation et une analyse constantes de son environnement naturel ; les éléments changent sans prévenir et nous obligent à ajuster nos manœuvres tout le temps. C’est vraiment spécial d’avancer grâce à tous ces éléments.

Comment fais-tu pour affronter ces éléments ?

Quand il y a des tempêtes ou des conditions extrêmes, il ne s’agit pas de lutter contre la nature. Elle est tellement imprévisible, tellement puissante que si on essayait de se battre et de forcer les choses, on risque des bris voire des accidents. Mais si on travaille avec la nature, en ajustant les voiles selon le vent, en orientant le bateau pour prendre les vagues dans le bon angle, alors on utilise les éléments à notre avantage et pour notre sécurité. En fait, tout dans la voile consiste à collaborer avec la nature, plutôt qu’à la combattre. Apprendre à écouter et à comprendre le vent, les courants, les marées, les respecter et en tirer profit avec intelligence, c’est ce qui me plait et c’est là toute la beauté de ce sport.

Voilier, portrait femme-nature
©Fabienne Macé
Justine, Femme-Nature, voile, Coupe Fémina
©Coupe Fémina

Le Québec est-il un endroit favorable à la pratique de la voile?

Oui, c’est un terrain d’apprentissage idéal ! Le fleuve Saint-Laurent est l’un des plans d’eau les plus réputés au monde pour sa complexité ; particulièrement à cause de ses hauts fonds,  des fortes marées, des courants puissants, du vent qui est très changeant en force et en direction. C’est un vrai challenge, surtout pour ceux qui viennent d’ailleurs et ne le naviguent pas tous les jours ; mais c’est ce qui le rend si intéressant. Chaque course ou navigation est un défi où l’on doit réfléchir à sa stratégie selon les conditions du moment, anticiper, prendre la bonne décision et toujours s’ajuster. Sur le fleuve, toute sortie est unique et permet d’expérimenter et de se dépasser. Mais bien sûr, j’ai envie de prendre de l’expérience en naviguant ailleurs aussi comme sur la mer Méditerranée et l’océan Atlantique ou dans les Caraïbes!

Sinon, la voile et surtout la voile de régate sont assez peu connues au Québec. Encore moins pour les femmes, car c’est un milieu qui demeure très masculin même aujourd’hui. Mais cela tend à se démocratiser grâce à des évènements comme la Coupe Femina et des modèles féminins qui inspirent les autres femmes et les poussent à se lancer.

Penses-tu que les femmes ont autant leur place que les hommes sur un voilier?

Oui, tout à fait. Je pense que les femmes sont tout aussi capables que les hommes de naviguer et contrôler un voilier. On n’a pas besoin d’être particulièrement musclée, il faut apprendre les bonnes techniques, savoir se servir des outils, et bien utiliser les éléments naturels. C’est un sport qui demande de la stratégie et de l’intelligence, pas seulement de la force brute. Parfois, nous les femmes, on prend un petit peu plus de recul et on se questionne davantage avant d’agir. Les bateaux sont faits pour que l’on ait pas à forcer beaucoup, alors quand on connaît bien son voilier et que l’on s’en sert efficacement face aux conditions, il n’y a aucune raison qu’une femme ne puisse pas accomplir les mêmes manœuvres qu’un homme.

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© Formation Nautique Québec
Voilier, portrait femme-nature
©Fabienne Macé

Qu’est-ce qui t’a incité à avoir ton propre bateau?

En fait, je l’ai acheté pour me pratiquer pour devenir instructrice et parce que j’avais envie de participer à des régates, mais aussi parce que j’aimerais faire de la voile en solitaire. Je me suis donné ce défi dans les prochaines années. Alors il me fallait  mon propre voilier. Mais c’est sûr que ce sont des choix que j’ai faits : je ne sors pas, je travaille l’été pour rembourser mon bateau, j’ai tout mis dans mon bateau alors je m’y consacre complètement et je travaille fort pour réussir.

Pratiques-tu d’autres activités sportives ou de plein air?

Avec mes études en plus, malheureusement je suis pas mal occupée. L’année dernière, j’ai quand même continué à jouer au hockey ; ce sont deux sports qui se complètent bien : l’été la voile, l’hiver le hockey.  De toute façon, il faut rester en forme, alors je cours,  je m’entraîne aussi au gym. Malgré le peu de temps,  je suis ouverte à essayer d’autres choses comme la randonnée ; ce n’est pas un milieu que je connais beaucoup. Une amie m’y a initiée l’an passé et j’ai vraiment aimé ça. Mais la voile prend beaucoup de place et j’aime tellement ça! Je veux poursuivre mes formations afin d’obtenir les certifications de voile avancée. J’aime beaucoup donner les cours élémentaires et faire découvrir à mes étudiants le monde de la voile.

Portrait Justine, femme nature voile
©Formation Nautique Québec
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©Bernard-Olivier Loyer

La voile pourrait-elle prendre un tournant professionnel dans ta vie?

Je ne ferme pas la porte à ça (rire!) Si un jour l’opportunité se présente… Peut-être plus en Europe qu’ici. Au Québec, les débouchés sont plutôt dans la navigation marchande par exemple et moi ce qui me plait, c’est la voile. Pour l’instant, je vais terminer mon bac en soins infirmiers. La santé est un domaine que j’aime beaucoup. Et comme je cherche un peu d’adrénaline, pourquoi pas les soins intensifs, les soins d’urgence ou peut-être travailler dans le Grand Nord pour un petit goût d’aventure ou même devenir infirmière sur un bateau! Chaque année depuis six ans, Justine participe à de nombreuses régates dont la Coupe Fémina, se faisant tour à tour équipière, co-skipper sur son propre voilier, et cette année, équipière à nouveau, mais sur un bateau de course cette fois-ci. Son ambition ? Continuer, progresser, expérimenter et pourquoi pas, se lancer dans la Transat Québec-Saint-Malo en 2028. Pour se donner un avant-gout d’exaltation, Justine est allée assister au départ du Vendée Globe le 10 novembre dernier aux Sables-d’Olonne sur les côtes françaises. «C’était extraordinaire comme expérience!» D’autant plus que cette année, on dénombre six femmes en lice sur quarante skippers et qu’à peine deux semaines après le départ trois d’entre elles se classaient dans le top 12! Quel bel exemple pour Justine qui est refuse de se voir comme un modèle et pourtant… Bravo les navigatrices!

Bien loin de se la couler douce sur le pont, Justine carbure à l’intensité, aux défis, à la persévérance récompensés par le plaisir immense d’être immergée dans la nature. Et pour beaucoup d’entre nous, c’ est une nature un peu méconnue où chaque geste, chaque manœuvre dépend de notre connexion avec les éléments. « La voile, c’est beau, parce que tu joues avec le vent,  avec l’eau, tu n’as pas de bruit de moteur… c’est juste le souffle du vent dans les voiles et le bruit des vagues qui frappent sur ton sur ton étrave.

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